Hache à la main, tu désertes tes compagnons. Bûcheron d'espoir. Lame contre roche, tu fends les mots stériles. Bon coup contre la rumeur, grands moulinets contre les bonnes moeurs. Tu défriches ton entourage, à la recherche d'une souche de vérité. Un premier arbre tombe : un bois dur et troué. Bûcheron, campe bien tes bottes dans la tourbe, frappe encore. Deuxième arbre : trop fragile, encore tout vert de rêves. La tête entre tes paluches, le coeur aux cendres, tu te questionnes. Une feuille verte, une micro-tige, épiphyte du déraciné. Tu y reconnais la force du chêne. De l'eau, du terreau, des mots pleins de douceur : " Pousse petite feuille ! " De jour en jour, la plante s'étire. Elle s'élargit, se forge des sillons sous des filets d'années. À chaque saison suffisent tes mots pour l'aider à croître. Et la plante croît. Elle y croit si fort, qu'elle vole d'extase. Cime épanouie, souriant à son horloger. Elle effleure les nuages, se laisse lénifier par la brise. De ta main noueuse, ridée, asséchée par le paillis, tu touches son écorce gorgée de sève.