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" M. DURKHEIM. - Je me sens un peu embarrassé pour répondre à l'exposé de M. Seignobos ; car je ne suis pas bien sûr d'être maître de sa pensée. Je voudrais savoir, avant de lui présenter des objections, s'il admet ou non la réalité de l'inconscient. Je ne vois pas clairement quel est son sentiment sur ce point. M. SEIGNOBOS. - Je crois que, parmi les phénomènes inconnus, il y en a certainement qui ont un caractère spontané (par exemple des phénomènes physiologiques comme la digestion), qui exercent une action causale indé- niable, mais que nous ne connaissons pas. M. DURKHEIM. - Dans son…mehr

Produktbeschreibung
" M. DURKHEIM. - Je me sens un peu embarrassé pour répondre à l'exposé de M. Seignobos ; car je ne suis pas bien sûr d'être maître de sa pensée. Je voudrais savoir, avant de lui présenter des objections, s'il admet ou non la réalité de l'inconscient. Je ne vois pas clairement quel est son sentiment sur ce point. M. SEIGNOBOS. - Je crois que, parmi les phénomènes inconnus, il y en a certainement qui ont un caractère spontané (par exemple des phénomènes physiologiques comme la digestion), qui exercent une action causale indé- niable, mais que nous ne connaissons pas. M. DURKHEIM. - Dans son exposition, M. Seignobos semblait opposer l'histoire et la sociologie, comme si c'était là deux disciplines usant de méthodes différentes. En réalité, il n'y a pas à ma connaissance de sociologie qui mérite ce nom et qui n'ait pas un caractère historique. Si donc il était établi que l'histoire ne peut admettre la réalité de l'inconscient, la sociologie ne pourrait tenir un autre langage. Il n'y a pas là deux méthodes ni deux conceptions opposées. Ce qui sera vrai de l'histoire, sera vrai de la sociologie. Seulement, ce qu'il faut bien examiner, c'est si vraiment l'histoire permet d'énoncer la conclusion, à laquelle aboutit M. Seignobos : l'inconscient est-il l'inconnu et l'inconnaissable ? M. Seignobos dit que c'est la thèse des historiens en général : mais il y en a beaucoup, je crois, qui repousseraient cette affirmation. Je citerai en particulier Fustel de Coulanges. M. SEIGNOBOS. - Fustel de Coulanges avait horreur de la notion même de conscience collective. M. DURKHEIM. - Mais il ne s'agit pas en ce moment de conscience col- lective. Ce sont là deux problèmes tout à fait différents. On peut se représenter le conscient et l'inconscient en histoire sans faire intervenir la notion de conscience collective ; ces deux questions n'ont aucun rapport l'une avec l'autre. L'inconscient peut être inconscient par rapport à la conscience individuelle et n'en être pas moins parfaitement réel. Séparons donc les deux problèmes : les idées de Fustel de Coulanges sur la conscience collective n'ont rien à voir ici. La question est de savoir si vraiment en histoire on ne peut admettre d'autres causes que les causes conscientes, celles que les hommes eux-mêmes attribuent aux événements et aux actions dont ils sont les agents."
Autorenporträt
Durkheim est sans doute, de tous les sociologues classiques, celui qui reste le plus présent dans la sociologie contemporaine. Cela constitue une sorte de paradoxe. Conservateur, voyant dans le socialisme plutôt une conséquence des dérèglements engendrés par l'évolution des sociétés modernes qu'un remède possible à leurs maux, convaincu que l'individu ne peut être heureux que dans une société qui lui impose normes et contraintes, Durkheim n'est guère au goût du temps. Pourtant, le visage qu'il donna à la sociologie, la méthodologie qu'il élabora sont aujourd'hui revendiqués par la communauté scientifique des sociologues comme un bien commun. S'il n'échappa pas complètement à l'esprit de système, il démontra, peut-être le premier avec une telle force, que la sociologie pouvait être une science positive. Émile Durkheim Photographie : Émile Durkheim Auteur des Règles de la méthode sociologique (1895), Émile Durkheim a donné à la «sociologie», discipline créée par Auguste Comte en 1838 mais encore associée chez ce dernier à la philosophie de l'histoire, son statut pleinement scientifique.