Depuis l'abolition de la peine de mort, aucune sanction du droit n'a connu ni n'a suscité plus d'engouement que ce qu'il est devenu désormais commun d'appeler, un peu vite toutefois, la "double peine". L'interdiction du territoire français, qui lui prête corps en droit interne, présente la particularité d'être à la fois indéniablement atypique et, en même temps, prétendument conventionnelle. Tout à la fois sanction pénale, soumise à la logique du droit de la peine, et mesure administrative, répondant à celle des autorités de police, elle se retrouve isolée entre les portes de sa légitimité d'un côté et celles de sa cohérence de l'autre. Nous verrons, à l'aune des standards actuels faisant référence en matière de droits humains et notamment de la prohibition de tout traitement discriminatoire, que sa quête ne peut aboutir.L'interdiction du territoire français présente en effet plus de vertus politiques que de pertinence juridique. C'est sans doute pourquoi elle interroge si vigoureusement le droit, dans ce qu'il a de plus profond, et les hommes, dans ce qu'ils ont de plus intime: une peine dédoublée est toujours double.