Le renouvellement de l'écriture dans la littérature négro-africaine d'expression française est le résultat d'une double crise : crise politique donc crise de l'écriture car l'écriture est le fruit du vécu quotidien, du "habitus". Sur le plan politique, les indépendances africaines n'ont en fait engendré que des monstres cruels. Des ogres aux soifs de sang jamais assouvies ont répandu la terreur en revendiquant des exploits de pacificateurs. Comme le soulignait déjà Tacite dans son Agricola, "Ubi solitudinem faciunt, pacem appellant". La littérature se fait comptable des horreurs vécues ; elle traduit le malaise général d'une Afrique spoliée au profit d'une nomenklatura restreinte. L'écriture de Sony fait ce sombre constat et crie l'espoir que tout n'est pas perdu. Ceux qui meurent ne le sont pas en vain. Sous cet angle, l'oeuvre de Sony apparaît militante, engageante, capable de chambarder l'univers tout entier et de produire l'espérance. Sony Labou Tansi a le mérite d'être humaniste puisque, au coeur de son oeuvre, c'est l'homme qu'on retrouve, dans son éternelle quête de liberté.