Il est possible de qualifier de nihiliste de type antirationaliste les discours de Bataille, Blanchot, Foucault, Derrida, Deleuze, Lyotard, Bourdieu, lorsqu'ils sont essentiellement tournés vers l'expérience intérieure de la destruction des soubassements de l'action afin d'empêcher l'acteur d'agir librement, source du pouvoir et de la domination, et à se saisir objectivement comme sujet, de peur qu'il puisse transformer en acte sa volonté de puissance, voire de la maîtriser. Le nihilisme étudié ici ne prétend donc pas créer de nouvelles valeurs à partir d'une "table rase" de ce qui, dans l'Histoire, réduit la valeur à la mesure, comme le reprochaient Jünger et Heidegger à la suite de Nietzsche et de Marx. Il veut briser toute table et à l'intérieur même des consciences pour empêcher non seulement la critique mais aussi le jugement, la mesure. La destruction de la notion même de valeur s'active donc non pas en vue de revenir dans le temps, ou de fonder plus originellement le sens des choses et de la vie en société, mais, uniquement, en vue de s'en servir pour manipuler le désespoir, le renoncement, afin de détruire tout ce qui élève.