Comme ils sont tristes, ces soirs d¿octobre ! Il y a dans l¿air une moiteur qui fait mourir les choses. Les feuilles tom- bent, comme lasses de vivre, sans le moindre vent qui les chasse. Des troupes d¿oiseaux reviennent au nid. Et, par le chemin qui monte, un chemin creux de la Vendée ange- vine, que les orages nettoient et qüémondent les chèvres, un jeune gars rentre à la ferme, à cheval sur la Huasse. Elle n¿est plus belle, la Huasse, avec ses poils blancs ébouriffés, son ventre énorme pelé par l¿attelage, sa crinière en éventail, qui lui donnent l¿air d¿un chat-huant. Elle va son pas résigné de serviteur usé à la peine, traînant sur les cail- loux les traits pendants de son collier, tandis que, par de- vant, son poulain gambade, comme un petit chevreuil blond et fou. Son cavalier ne la presse pas. Ils sont, elle et lui, presque du même âge. Depuis quinze ans qüil est au monde, elle l¿a si souvent porté sur son dos, de cette même allure maternelle que rien n¿étonne ! Maintenant, c¿est sa compagne de labour. Toute la journée, ils ont hersé en- semble dans les terres basses. La chaleur était grande, les mottes étaient dures. Tous deux sont las. Il la laisse donc al- ler, la bonne bête, aussi doucement qüelle veut, les yeux mi-clos, et lui, tranquille, dépassant la haie de toute sa tête baignée de lumière, il regarde cette campagne superbe dont il est l¿enfant.
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