La poésie moderne montre une double tendance, à la fois ontologique et non-ontologique. D'une part,elle semble en mesure de dire l' être, de le dévoiler tel qu'il est; d'autre part, la poésie renonce à ce pouvoir ontologique en déclinant le monde négativement, en l'indiquant comme une absence inatteignable. Ce double mouvement a engendré, sur le versant de la critique littéraire, une lecture dichotomique, qui se résume à un conflit entre une interprétation structuraliste de la poésie moderne, où l'on envisage son faire poétique comme purement auto-référentiel, et une interprétation ontologique, qui lui redonne un horizon mondain. En réalité, ces deux aspects de la poésie moderne développent davantage une double façon de décliner le monde qu'une opposition irréductible. C'est pourquoi, notre objectif a été de repenser autrement le mouvement "négatif" de la poésie moderne en concentrant notre attention sur Mallarmé, où la visée indirecte du monde, par une parole qui se fait image, déploie une poésie ouverte à l'altérité tout en renonçant à la prétention de donner son essence ultime.