La santé est un concept carrefour qui permet à l'homme de lire le monde et de se comprendre en tant que sujet biologique. C'est une des raisons pour laquelle la société actuelle situe la santé dans une dimension essentielle du bien-être de l'homme. Une large majorité de personnes conçoit que la santé, tout comme la maladie, a la singularité de laisser croire qu'il est un état ou une chose donnée, c'est-à-dire une réalité objective. On peut de ce fait être tenté de placer la santé du côté de la norme (normalité) et la maladie du côté de son contraire, c'est-à-dire du pathologique. De ce fait, la santé apparaît comme un état d'équilibre stable et quasi-parfait qui se trouverait altéré dès que le corps est affecté par une pathologie quelconque. Georges Canguilhem (1904-1995) relève avec justesse que la santé n'est pas un « état normal » mais une capacité d'adaptation individuelle aux variations du milieu. La santé n'est pas un état impeccable, un ordre parfait dépourvu de variations. Pour lui, la santé est concomitamment une adaptation actuelle et une adaptation potentielle. Elle est une « normativité biologique » qui oscille entre le normal et le pathologique.