Classés au Patrimoine de l'humanité, les corons n'étaient plus entrés en littérature depuis Zola. Dans les années 1960-1970, Daniel Carton était un gamin de la cité Clarence, du nom d'une rivière n'y passant pas. Cette tentative de poétisation avait tourné court, car tout le monde l'appelait "la Clac". Il s'agissait d'une ville minière bâtie autour d'un des puits les plus profonds d'Europe. Les familles de mineurs y partageaient les mêmes joies et les mêmes détresses, subissant leur sort avec résignation, cette seconde peau des humbles. Entre les devoirs du "bon chrétien", les ordres des ingénieurs des houillères et les accolades khrouchtchéviennes accordées par les camarades de la mairie aux élèves reçus au "certif", les contradictions étaient nombreuses et les espaces de liberté plutôt rares. Mais les habitants de ce monde clos, sans télévision, sans voitures, sans téléphone, étaient aussi solidaires à tout crin, forts en gueule dans leur inimitable patois. Les seuls châteaux à l'horizon étaient les châteaux d'eau. Pourtant, suivant Pagnol, Daniel Carton aurait pu intituler son récit La cité de ma mère, en hommage à cette femme qui l'a élevé seule avec trois fois rien mais chevillée à l'âme cette foi qu'on dit du charbonnier, cette incapacité à douter de la "grâce" de Dieu. Retrouvant ses yeux d'enfant sans perdre son humour d'adulte, Daniel Carton décrit l'attachement viscéral du peuple des corons à leurs petites maisons de briques, leurs petits jardins, qui ne les empêchait pas de souhaiter que leurs enfants en sortent, s'en éloignent le plus possible, et jamais plus ne travaillent de leurs mains.
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