Stéphane, tueur à gages reconverti, reçoit un nouveau contrat... qui pourrait bien être le dernier.
Fraîchement reconverti à la photographie, Stéphane s’est décidé à abandonner sa vie de tueur à gages. C’était sans compter sa rencontre avec Mme Hairos – prétendument déesse de l’amour – et son angélique disciple. La proposition de contrat est simple : jouer à Cupidon en perçant d’une flèche unique les cœurs des amoureux. Tâche aisée pour Stéphane – et philanthropique même, se dit-il ! Du moins, c’est ce qu’il avait cru comprendre.
L'amour et la mort sont souvent liés. C'est particulièrement le cas dans cette nouvelle d'Éric Lysøe, qui réactualise le personnage d'Eros dans notre société moderne.
[Pour public averti]
EXTRAIT
— Vous avez compris que je ne suis pas une femme ordinaire, mon cher. Cela fait maintenant longtemps…
Elle souffla, comme écrasée de lassitude, avant de poursuivre :
— Oui !… Trop longtemps que j’exerce, que je tire mes flèches sur le menu peuple des amants. Ah ça ! J’ai été un cupidon adorable, batifolant entre la cuirasse de mon père et les dessous affriolants de ma mère. Je me dépensais alors sans compter. Et combien de passions j’ai pu faire naître sous mes traits ! Tristan et Yseult, Orphée et Eurydice, Salomon et Balkis, c’était moi. Sans oublier Abélard et Héloïse, Renaud et Armide ou Dante et Béatrice… À chaque fois, l’une de mes flèches artistement fichée en plein cœur a scellé leur destin. Pas un qui m’ait échappé !
Mme Hairos toussota avant de s’enfoncer plus profondément encore dans ses coussins. Elle paraissait épuisée par les quelques phrases qu’elle venait de prononcer d’une traite.
— Mais voilà, continua-t-elle malgré tout en soufflant un peu, l’âge, le caractère monotone de ma tâche, les réactions assez convenues de mes victimes, pour ne rien dire de l’évolution pour le moins chaotique de votre société, tout cela a fini par avoir raison de mon enthousiasme. Vous me voyez fort lasse, cher monsieur Lempereur, et bien décidée à prendre ma retraite. Grâce à l’époux de ma mère – je ne parle pas de mon géniteur, ce vrai panier percé –, grâce à l’époux de ma mère donc, j’ai amassé une jolie petite fortune dont je souhaiterais à présent pouvoir jouir pleinement.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Spécialiste des littératures de l’imaginaire, Éric Lysøe a consacré de nombreux essais et anthologies aux écrivains les plus représentatifs du genre. Il est aussi auteur de romans et nouvelles fantastiques comme Un cerf en automne (2013), Bois morts (2013), Les Tambours du vent (2014) ou Dans la lumière de l’île (2015). Plus récemment, il s’est tourné vers la science-fiction ( La Source, Galaxies, n° 45, 2017) et vient de publier aux éditions Arkuiris une anthologie : Musiques d’outre-mondes.
Fraîchement reconverti à la photographie, Stéphane s’est décidé à abandonner sa vie de tueur à gages. C’était sans compter sa rencontre avec Mme Hairos – prétendument déesse de l’amour – et son angélique disciple. La proposition de contrat est simple : jouer à Cupidon en perçant d’une flèche unique les cœurs des amoureux. Tâche aisée pour Stéphane – et philanthropique même, se dit-il ! Du moins, c’est ce qu’il avait cru comprendre.
L'amour et la mort sont souvent liés. C'est particulièrement le cas dans cette nouvelle d'Éric Lysøe, qui réactualise le personnage d'Eros dans notre société moderne.
[Pour public averti]
EXTRAIT
— Vous avez compris que je ne suis pas une femme ordinaire, mon cher. Cela fait maintenant longtemps…
Elle souffla, comme écrasée de lassitude, avant de poursuivre :
— Oui !… Trop longtemps que j’exerce, que je tire mes flèches sur le menu peuple des amants. Ah ça ! J’ai été un cupidon adorable, batifolant entre la cuirasse de mon père et les dessous affriolants de ma mère. Je me dépensais alors sans compter. Et combien de passions j’ai pu faire naître sous mes traits ! Tristan et Yseult, Orphée et Eurydice, Salomon et Balkis, c’était moi. Sans oublier Abélard et Héloïse, Renaud et Armide ou Dante et Béatrice… À chaque fois, l’une de mes flèches artistement fichée en plein cœur a scellé leur destin. Pas un qui m’ait échappé !
Mme Hairos toussota avant de s’enfoncer plus profondément encore dans ses coussins. Elle paraissait épuisée par les quelques phrases qu’elle venait de prononcer d’une traite.
— Mais voilà, continua-t-elle malgré tout en soufflant un peu, l’âge, le caractère monotone de ma tâche, les réactions assez convenues de mes victimes, pour ne rien dire de l’évolution pour le moins chaotique de votre société, tout cela a fini par avoir raison de mon enthousiasme. Vous me voyez fort lasse, cher monsieur Lempereur, et bien décidée à prendre ma retraite. Grâce à l’époux de ma mère – je ne parle pas de mon géniteur, ce vrai panier percé –, grâce à l’époux de ma mère donc, j’ai amassé une jolie petite fortune dont je souhaiterais à présent pouvoir jouir pleinement.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Spécialiste des littératures de l’imaginaire, Éric Lysøe a consacré de nombreux essais et anthologies aux écrivains les plus représentatifs du genre. Il est aussi auteur de romans et nouvelles fantastiques comme Un cerf en automne (2013), Bois morts (2013), Les Tambours du vent (2014) ou Dans la lumière de l’île (2015). Plus récemment, il s’est tourné vers la science-fiction ( La Source, Galaxies, n° 45, 2017) et vient de publier aux éditions Arkuiris une anthologie : Musiques d’outre-mondes.