[...] Eh quoi ! se disait-il, serais-je condamne a travailler comme journalier, comme homme de peine, dans les lieux memes ou mon pere cultivait pour son propre compte ? La pensee d'emigrer, de s'expatrier, lui venait bienquelquefois, mais il la repoussait aussitt comme anti-patriotique, anti-nationale. [] Mais dites-moi, je vous prie, puis-je en toute confiance choisir dans les milliers d'arpents non encoredfrichs de ces vastes Cantons de l'Est, le lot qui me conviendra, sauf en payer plus tard le prix aupropritaire, quand il me sera connu ?[]. Oh ! Gardez-vous-en bien. Si je vous racontais tous les malheurs qui sont rsults des imprudences de ce genre, et dont nos pauvres compatriotes ont t les victimes, depuis un certain nombre d'annes, vous en frmiriez. Les grands propritaires de ces terres incultes ne sont pas connus aujourd'hui, mais ils se cachentcomme le loup qui guette sa proie ; et lorsque, aprs plusieurs annes de travail, un dfricheur industrieux aura doubl la valeur de leur proprit, ils se montreront tout--coup pour l'en faire dguerpir. []Eh bien ! dit Jean d'un ton srieux, je suis devenu propritaire. J'ai maintenant moi, en pleine proprit, sans aucune redevance quelconque, sans lods et ventes, ni cens et rentes, ni droit de banalit, ni droit de retrait, ni aucun droit quelconque, un magnifique lopin de terre de cent acres de terre
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