L'Amérique est en crise. La première puissance du monde ne sait plus où elle va, et le monde entier commence à s'interroger. Cette inquiétude est-elle justifiée? Oui, répond Michel Crozier. Sociologue libéral, confiant dans les possibilités infinies de la démocratie, il a cru à la vertu stimulante du modèle américain. Car nous vivions sur l'image d'une Amérique heureuse, pays de la générosité et du progrès illimité, de la science et de la raison. Mais le temps de cette Amérique heureuse semble maintenant aussi lointain que l'avant-guerre. Elle a succombé au drame du Vietnam, aux émeutes raciales, à la contestation. Depuis l'assassinat de Kennedy, les Etats-Unis sont entrés dans le temps du tragique. Et les présidences des rois maudits, Johnson et Nixon, ont mené au déclin et à la crise actuelle. Pourquoi tout cela? Parce qu'il y avait une faille dans le modèle américain: le pays de la liberté et de la poursuite du bonheur ne voulait pas reconnaître l'existence du Mal. Le mal américain n'est, au fond, rien d'autre que la réapparition de ce Mal que l'Amérique avait voulu oublier. Il n'y a plus désormais de grand frère pour montrer la voie. Le développement de la démocratie exige que l'Europe à son tour apporte sa contribution. L'auteur: Michel Crozier dirige au sein du CNRS le Centre de sociologie des organisations qu'il a fondé en 1961. Ses principaux ouvrages lui ont valu une notoriété internationale: le Phénomène bureaucratique (1964), la Société bloquée (1970), l'Acteur et le Système (1977), On ne change pas la société par décret (1979). Michel Crozier a enseigné à plusieurs reprises à l'université de Harvard.
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