À partir du XVIIIe siècle, on assiste à une mutation radicale de la figure paternelle dans le discours culturel, social et politique européen. L’imaginaire romanesque ne pouvait que refléter – dans les formes toujours obliques du langage artistique, mais pleinement reconductibles à une relation de cohérence schématique avec la réalité – les modifications historico-sociales dont le père a été l’objet. Qu’elle soit évanescente ou tyrannique, tendre ou violente, la paternité, telle qu’elle se fait jour dans la littérature, devient en effet le lieu d’un questionnement qui va bien au-delà de sa propre signification spécifique et revêt une portée métaphorique plus universelle. Portant sur des auteurs particulièrement significatifs de l’histoire littéraire française moderne, les contributions réunies ici se penchent sur cette question, avec une attention particulière portée au passage du paradigme aristocratique au paradigme bourgeois qui s’impose avec la Révolution. Mais les représentations de la paternité constituent en même temps un élément fondamental pour interroger les inquiétudes qui caractérisent la culture démocratique des XXe et XXI e siècles.