Extrait
I-DÉPART POUR LE BAL
La jeunesse de Daniel Henry se passa alternativement à mépriser les prescriptions de la mode, et à tenter de vains efforts pour s’y conformer.
Il employa des années de sa vie à rêver la conquête de ces fantômes insaisissables : un chapeau élégant, un col de chemise bien dégagé, un veston bien coupé. Les haut-de-forme, si reluisants et séduisants tant qu’ils habitaient le magasin orné de glaces, contractaient au contact de la tête de Daniel Henry une sorte de maladie de vulgarité. Les collets de veston montaient jusqu’à la nuque, au mépris absolu des cols de chemise, dont ils ne laissaient plus rien voir.
Daniel avait été élevé par sa famille dans cette idée que les tailleurs fashionables et chers n’étaient pas plus adroits que certains tailleurs à bon marché qui habitaient dans les rues étroites du quartier Montorgueil.
— D’ailleurs, disait la mère du jeune Henry quand elle avait découvert un nouveau tailleur en chambre, c’est un homme qui travaille pour les premières maisons de Paris, et l’on peut avoir pour quatre-vingt-dix francs chez lui un vêtement qu’on paierait facilement le double ailleurs.
Daniel s’était commandé un habit de soirée à l’occasion de sa vingtième année. C’était son deuxième habit. Il s’était beaucoup développé en trois ans, et le premier était décidément trop étroit. Pendant plusieurs semaines, il avait vécu dans l’espérance de ce vêtement neuf, qui devait le mettre enfin au niveau social d’André Bardot et de Lucien Bayonne, deux jeunes gens qu’il devait rencontrer au bal des Voraud, et qui l’avaient toujours médusé par leur inaccessible élégance...
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