Dans ce nouveau livre, BHL a choisi de mêler l'autobiographie au reportage. Et il inscrit le tout dans ce que l'on pourrait appeler sa « métaphysique du Mal ». Le reportage, tout d'abord : au cours de l'année 2001, BHL est allé observer de près, cinq « guerres oubliées » : au Burundi, en Angola, au Soudan, au Sri-Lanka, en Colombie. Dans chacun de ces pays, il s'est plongé au coeur de conflits - qui durent, parfois, depuis plus de trente ans, et qui n'ont même plus d'enjeux politiques - dont le sens, s'il a jamais existé, s'est complètement perdu pour les acteurs eux-mêmes. Il a vu, au quotidien, ces « guerres de spectres », dont l'issue est indifférente au reste du monde, et qui n'en continuent pas moins de tuer par milliers, par centaines de milliers. Chacune de ces guerres fait l'objet d'un reportage qui est publié dans Le Monde, à la fin mai. Ces « reportages » - dont on parlera beaucoup lors de leur pré-publication - constituent la seconde partie de cet ouvrage. Quant à la première partie, d'égale importance (150 pages), elle traite, plus précisément, de l'aspect « autobiographique » de cet ouvrage. Car BHL l'avoue : depuis ses aventures au Bangladesh, il y a trente ans, il entretient un rapport étrange, ambigu, avec la guerre. Elle lui fait horreur, certes. Mais il aime l'observer, partager la vie de ses acteurs, s'y perdre, s'y exiler... Pourquoi, alors, ce « goût » ? Au nom de quelle nostalgie ? Au nom de quelle culpabilité ? Au nom de quelle trouble fascination pour le mal et son spectacle ? Ces questions donnent lieu à des développements que BHL avait déjà esquissés - dans Le Diable en tête, dans Le Lys et la cendre - et qui, ici, complètent (avec Comédie) une sorte d'autobiographie éclatée. La confession s'y mêle à la théorie. Le « roman d'une vie » alterne avec l'analyse de l'époque. C'est beau. Pudique. Lucide.
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