La réponse aux attentats de janvier 2015 appelait un renouvellement des idées, des dispositions et des actions de notre pays. Perdurent au contraire les manières de penser les plus paralysantes : la «laïcité» serait la solution au «problème de l'islam», l'effacement de la présence publique du religieux serait la solution au problème des religions. Tout est faux dans cette thèse. Au lieu de chercher une neutralité impossible, qui couvrirait en fait une guerre sournoise, nous devons accepter et organiser la coexistence publique des religions, leur participation à la conversation civique.En entrant dans la communauté nationale, l'islam est entré dans une nation de marque chrétienne, où les juifs jouent un rôle éminent. Toute politique qui ignore cette réalité court à un échec cuisant, et met en danger l'intégrité du corps civique. Il s'agit donc, tout en préservant la neutralité de l'État, de faire coexister et collaborer ces trois «masses spirituelles». Loin que la mondialisation réclame l'effacement de la nation et la neutralisation de la religion, c'est son indépendance politique et spirituelle, et son ouverture au religieux, qui permettront à la France de franchir en sureté et avec honneur la zone de dangers dans laquelle elle est entrée.Pierre Manent a été directeur d'études à l'EHESS. Membre fondateur de la revue Commentaire, il a publié de nombreux ouvrages, parmi lesquels: La Cité de l'homme (1994), La Raison des nations (2006), Les Métamorphoses de la cité (2010), Montaigne. La vie sans loi (2014).
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