Auteur prolixe injustement oublié de nos jours par la critique littéraire et le grand public, Pierre Zaccone eut pourtant un certains succès en son temps, collaborant avec de grands écrivains restés célèbres tels que Paul Féval et tenant même un rôle essentiel au sein de la Société des Gens de Lettres, la SGDL, dont il sera nommé président en 1873. Écrivain populaire par excellence surnommé L’Empereur du Feuilleton, il signa plus de soixante-dix fictions dans un style singulier mêlant énigmes, suspense et coups de théâtre qui lui confère aujourd’hui encore une véritable modernité. L’histoire qui suit fait d’ailleurs partie de ces livres qu’on ne lâche pas jusqu’à la fin, de ces ouvrages désormais qualifiés de « Page-Turner ». Extrait : « Il y a à Londres un quartier dont la physionomie n’a été qu’esquissée jusqu’ici et qui méritait cependant une mention spéciale dans les récits des romanciers modernes de la Grande-Bretagne. Nous voulons parler du quartier sur lequel se trouve située la prison de la Flotte, dont les limites ont conservé, comme on le sait peut-être, les privilèges et les franchises des anciens asiles. En donnant au prévôt de la Flotte des garanties pour le montant de la somme due à son incarcérateur, chaque prisonnier peut obtenir l’autorisation de résider aux environs de la prison, et jouir ainsi d’une liberté relative. Il résulte de cette tolérance que ce quartier est presque entièrement habité par une agglomération interlope de banqueroutiers maladroits et de débiteurs insolvables, auxquels se mêle une population flottante d’ivrognes fainéants et de filous actifs, de telle sorte que, passé une certaine heure de la nuit, il est bien rare d’y rencontrer une figure honnête. Cependant, le 25 novembre de l’année 1838, vers dix heures du soir, un homme qui n’était ni banqueroutier, ni débiteur insolvable, ni ivrogne, ni filou, parcourait à pas rapides et pressés l’une des rues étroites qui longent les prisons de la Flotte. Cet homme pouvait avoir une cinquantaine d’années ; il était petit, gros, replet, et sa physionomie, animée par deux yeux vifs et doux, annonçait une nature placide, que les soucis de la vie n’avaient jamais dû beaucoup inquiéter. »